Former les RH à la transformation

 

Depuis le début des années 2000, avec une accélération en 2008 quand chute la banque américaine Lehman Brothers, les entreprises ont dû faire face à des perturbations macro-économiques majeures. En parallèle, elles ont dû gérer des mutations, telles que l’arrivée du numérique et des applications, mais aussi comprendre les changements de comportements de leurs consommateurs (instantanéité, zapping, infidélité).
Dans ce contexte, il est plus difficile pour les dirigeants d’entreprise de se projeter sur du long terme. Ils se trouvent contraints d’avancer à vue. Cependant, ce court terme s’avère être aussi une opportunité pour s’adapter aux nouveaux contextes et permettre ainsi d’atteindre le prochain niveau de croissance. Le langage de l’entreprise se modifie : évoquer des orientations stratégiques n’est plus approprié face aux nouveaux enjeux. Il est maintenant question de transformation et de conduite du changement, qui remettent la notion d’engagement au centre de la stratégie de l’entreprise.

De nouvelles terminologies

 

La transformation est un mouvement initié qui nécessite au préalable de définir une vision, celle attendue et celle vers laquelle les dirigeants vont inviter les collaborateurs à adhérer. Cette transformation démarre sans que sa date d’achèvement soit fixée ou connue. Mais des signes extérieurs vont permettre d’affirmer qu’il y a bien eu transformation.
Un changement est une modification d’une situation, d’une habitude, d’un fonctionnement. Les changements interviennent derrière la transformation.
Chaque changement va être décomposé sur la forme d’un ensemble de projets. Ainsi, chaque changement va être structuré dans l’entreprise avec des objectifs, des plannings et des équipes dédiées.

Quel indicateur de performance pour une transformation ?

Il est important de noter que gérer une transformation comme un projet n’est pas gérer la conduite du changement. Cela reviendrait à ne considérer que la dimension technique. Il manquerait une dimension primordiale : l’humain. La gestion du changement repose sur la dimension humaine.
Cependant, comme il n’existe pas de volonté naturelle de réaliser des transformations et des changements quels qu’ils soient, le principal obstacle à la gestion du changement est la résistance.
L’humain n’est pas formaté pour changer spontanément, sauf contraint. C’est la raison pour laquelle il faut l’emmener à l’intérieur de cette transformation. C’est tout le volet communication qui suscitera l’engagement que les dirigeants doivent travailler. La transformation repose sur la confiance apportée au capital humain.
Nous sommes loin des orientations stratégiques qui s’imposent aux salariés par le biais de chiffres clés de l’entreprise. L’humain doit être placé au centre de la transformation. Les dirigeants doivent être en mesure de porter un message, à savoir partager la vision, la mission et les valeurs qui incarneront la transformation. L’engagement des collaborateurs de l’entreprise constituent de ce fait le principal facteur clé du succès. Mesurer cet engagement est le meilleur indicateur de performance.

Accompagner le changement au sein de l’entreprise

 

Tout d’abord, au-delà de porter le projet de transformation, l’entreprise doit s’être équipée pour accompagner le changement. Les entreprises matures sont celles qui investissent jusqu’à 10% du projet global dans la conduite du changement. Ce qui signifie investir dans une équipe de spécialistes dont c’est le métier. Ils vont déployer des méthodologies spécifiques, afin de mesurer les impacts de chaque changement, déterminer les populations impactées, rechercher les bénéfices de chaque impact, déterminer les acteurs clés de l’organisation dont le support sera primordial, pour enfin déterminer un plan de communication et de formation spécifique à chaque changement.
Mais aussi, s’assurer que les acteurs clés de l’organisation comprennent la courbe du changement : les travaux d’Elisabeth Kübler-Ross ont mis en valeur deux phases : l’une descendante qui s’accompagne d’une attitude négative et contre-productive tournée vers le passé et le refus ; et l’autre, ascendante, où l’attitude est productive tournée vers le futur et le productif. Connaître les phases de la courbe du changement, appelée aussi courbe de deuil, permet de comprendre les résistances, le temps d’intégration et d’accompagner les personnes dans ce processus. Quand les acteurs clés de l’organisation sont formés à la notion de courbe du changement, ils sont beaucoup plus performants pour accompagner le changement auprès de leurs équipes.

Enseigner le changement

 

Les changements dans les entreprises se succèdent et le rythme ne devrait pas fléchir. Faire prendre conscience à la nouvelle génération qu’elle devra faire face à ce défi, quel que soit l’entreprise, parait primordial. S’il est intégré que le changement sera un prérequis, et s’ils sont formés, cela sera un atout dans la gestion de leur carrière.
Enfin, la formation à ces nouvelles méthodologies d’Impact Assesment, de Stakeholder Mapping pourrait susciter des vocations, puisqu’en devenant un impératif d’entreprise, la conduite du changement a créé des métiers. D’ailleurs de nombreux cabinets en ont fait leur spécialité.

Article paru dans Personnel, revue de l’ANDRH, mois d’octobre 2018

Laurence MERGER

Consultante Ressources Humaines